Blois | Un homme écope de 6 ans de prison pour le viol d’une jeune

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“J’avais honte et aussi peur que personne ne me croie” exprime la victime
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Un homme d’une quarantaine d’années comparaissait depuis jeudi 4 novembre 2021 pour un viol commis en 2015 à Blois sur un jeune homme qui était alors mineur. Au terme de 2 jours de procès, l’accusé a été condamné à 6 ans de prison.

Mise à jour du 7 Novembre 2021

L’accusé était arrivé libre au tribunal, même s’il était sous contrôle judiciaire ; il en est reparti les menottes aux poignets, ses sanglots faisant écho aux pleurs de soulagement de la victime et de ses amis, plus de 6 ans après les faits évoqués lors de l’audience. L’homme était accusé d’avoir violé un jeune homme âgé de 16 ans à l’époque, en forêt de Blois, en avril 2015.

Après une première journée d’audience, le deuxième jour de procès a débuté par l’audition de Cendrine Peris, experte psychologue, venue donner les conclusions du rendez-vous qu’elle avait eu avec la victime peu après son dépôt de plainte, en octobre 2015. Elle a parlé d’un individu

« qui a besoin d’être avenant, pour mieux masquer des éléments dépressifs »,

notant un

« stress post-traumatique majeur et ancré ».

Des doutes soulevés par la défense

Une des amies de la victime a également témoigné, indiquant s’en vouloir

« de ne pas avoir remarqué à quel point ça n’allait pas »,

parlant de la période qui vient de s’écouler pour son ami comme une

« parenthèse de six ans de sa vie »

à l’issue de laquelle

« il doit se reconstruire ».

La présidente Aude Cristau a alors tenté à nouveau d’obtenir des déclarations de l’accusé. Mais comme la veille, la confusion l’a emporté, l’homme ne comprenant pas les questions, semblant répondre « oui » ou « non » au hasard, même quand on lui posait des questions ouvertes.

Pour le ministère public, l’avocate générale Chantal Moulin-Bernard a justifié le délai entre le viol subi et la plainte déposée par la victime, indiquant que dans la majeure partie des cas dans ces affaires-là,

« les dénonciations sont souvent indirectes et tardives, avec des personnes qui font état de haine et de dégoût ».

Considérant disposer d’un « faisceau d’indices concordants », tout en soulignant que le discernement « est certes altéré mais pas aboli », elle a requis une peine mixte « afin qu’il prenne conscience de ses actes ».

Elle a demandé une condamnation à 5 ans de prison dont 4 assortis d’un sursis probatoire, avec des obligations de soins, d’indemniser la victime et l’inscription au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles (Fijais).

L’agression subie par la victime en avril 2015 n’a pas été mise en doute, même par la défense. C’est plutôt sur l’identité de l’agresseur que Me Fossier a émis des réserves.

« Le doute doit toujours profiter à l’accusé, a-t-elle lancé en débutant sa plaidoirie. Or on ne sait pas quel jour a eu lieu l’agression, mon client ne peut pas dire à quel endroit il était à ce moment-là. »

Elle a rappelé l’état de l’accusé,

« quelqu’un qui est vulnérable, qui est souvent victime des autres »,

assurant qu’il était

« impossible d’utiliser ses déclarations, qui ne sont pas cohérentes ».

Dès lors, elle a insisté sur les points qui sèment le doute, provoquant la colère de la victime, conduite par ses amis à l’extérieur de la salle.

« Dans la plainte, on parle d’un agresseur qui mesurerait 1,75 m, alors que mon client fait 1,55 m. On ne peut pas confondre de 20 cm, même dans cette situation ! »

Pour l’avocate,

« en voulant absolument retrouver son agresseur, il s’est peut-être autopersuadé qu’il l’avait trouvé, parce qu’il connaissait ce visage pour l’avoir déjà croisé. »

Les jurés ont pourtant décidé d’entrer en voie de condamnation, le tribunal prononçant même une peine beaucoup plus lourde que les réquisitions. L’homme a été conduit à la maison d’arrêt de Blois et dispose de 10 jours pour faire appel de la décision.

 “Une volonté de vérité et de justice”

L’avocat de la victime, Me Sieklucki, a débuté en rappelant le « parcours difficile » de son client, avant même son agression, puisque celui-ci avait été placé dès ses 10 ans en famille d’accueil. Et quand il a subi ce viol,

« il était obsédé par le fait qu’il ne voulait surtout pas que cela se sache. Quand on reste silencieux, un poids s’installe, qui devient à un moment insupportable. »

Pour expliquer quelques imprécisions soulevées par la défense à propos des déclarations de la victime lors de son dépôt de plainte, il a expliqué :

« Il est extrêmement difficile d’expliquer précisément une scène quand on ne s’y attend pas. Et il y a eu cinq années de procédure, c’est énormément long. »

Il a rappelé la réaction de son client quand on lui a présenté son agresseur derrière une glace sans tain, détournant le regard et blêmissant, une attitude qui ne laisse pas de place au doute.

« Il ne s’agit pas de haine ou de vengeance, simplement une volonté de vérité et de justice. »

Article original du 6 Novembre 2021 :

Plus de 6 ans après les faits, la victime s’est présentée à la barre du tribunal de Blois ce jeudi pour raconter une nouvelle fois son histoire, après avoir pris une longue inspiration. Adolescent « joyeux » qui vivait au sein d’une famille d’accueil, il s’est « renfermé » sur lui-même après avoir subi un viol en avril 2015 en forêt de Blois, alors qu’il était âgé de 16 ans.

« J’habitais à Chambon-sur-Cisse, j’étais venu voir une amie durant un après-midi à Blois en venant à pied par un chemin forestier, que j’ai repris au retour. Je suis passé devant un banc sur lequel était assis un homme auquel je n’ai pas prêté attention et j’ai continué ma route. Quelques minutes plus tard, je me suis aperçu qu’il me suivait, j’ai accéléré et j’ai cherché à appeler ma famille d’accueil, mais je n’avais pas beaucoup de réseau. Finalement, l’homme m’a rattrapé, m’agrippant par l’épaule avant de me jeter dans le fossé. »

Les larmes remontent alors que son avocat Me Sieklucki l’aide à s’asseoir et qu’il décrit ce qu’il a subi : d’abord une gifle reçue, puis une fellation forcée avant une pénétration anale.

« J’étais paralysé, incapable du moindre mouvement »,

se souvient la victime, devant son agresseur présumé qui comparaissait libre sous contrôle judiciaire.

Une plainte déposée 5 mois plus tard

Après le départ du violeur, le jeune homme est rentré chez lui mais n’a raconté son histoire à personne.

« J’avais trop honte, et aussi peur que personne ne me croie. »

Ce n’est que quelques mois plus tard, en juillet, alors qu’il vient de changer de famille d’accueil pour être plus proche de son lycée, qu’il parvient à mettre des mots sur ses troubles, même s’il refuse encore de porter plainte. Il le fera pourtant en septembre, après avoir fortuitement croisé son agresseur aux abords de son établissement.

Le jeune homme va jusqu’à se mettre en quête de son violeur et parvient à le repérer en mars 2016 dans un supermarché blésois. Il appelle alors la police qui procède à l’interpellation de l’individu, que l’agressé reconnaît formellement.

L’accusé nie en bloc

Ce procès est une manière pour lui de tourner la page alors que de l’avis de ses proches, il est en train de remonter la pente après une longue période sombre, marquée par plusieurs tentatives de suicide et des séjours en hôpital psychiatrique.

L’accusé, lui, nie tout en bloc. Même si ses grosses difficultés d’élocution ne permettent pas de bien le comprendre (lire encadré)), il parvient à faire comprendre avec des gestes qu’il n’a pas eu de relations sexuelles avec la victime, assurant même qu’il n’en a jamais eues. Des dires qui seront infirmés par un homme interrogé ce jeudi, qui assure avoir eu plusieurs relations sexuelles également en forêt de Blois avec l’accusé, celles-ci étant totalement consenties.

La deuxième journée d’audience aura lieu ce vendredi, à partir de 9 h, et sera marquée notamment par les réquisitions du parquet et les plaidoiries des avocats.

Un accusé insaisissable

La première journée a débuté par l’étude de la personnalité de l’accusé. La présidente, Aude Cristau, a évoqué des « troubles du langage » et une « altération des fonctions cognitives », avant que l’enquêtrice de personnalité, Ludivine Luppi, ne donne plus de détails. Elle a parlé d’un individu ayant « une compréhension et une expression limitées » après avoir connu de graves problèmes de santé.

Huitième enfant dans une famille de gens du voyage sédentarisés à Blois, il a été touché à la naissance par une malformation cardiaque qui l’a conduit à subir des soins dès sa prime enfance. Il a également été sujet à de nombreuses crises d’épilepsie. De lourds troubles neuropsychiques en ont découlé, l’enquêtrice estimant qu’il avait « un niveau CP », avec un quotient intellectuel évalué à 56 en 1991. Il vit près de sa mère de 88 ans et ses journées sont très ritualisées, avec très peu d’interactions avec l’extérieur : il commence en prenant un café dans un bar proche de chez lui, puis rentre faire du jardinage et du bricolage avant d’aller marcher l’après-midi. « Naïf, influençable », il est « souvent victime de vols ».

Les tentatives du tribunal d’en savoir un peu plus ont vite tourné court. L’accusé ne comprenait pas toujours les questions, même en les reformulant ; et quand il les comprenait, sa mauvaise élocution ne permettait pas de comprendre le fond de sa pensée, malgré les tentatives de « traduction » de son avocate Me Fossier.

Le discernement paraît fortement altéré mais sur les faits, l’accusé s’est borné à nier en bloc.

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