Beauvais | Deux ans ferme pour le beau père incestueux

Digne, Laetitia (le prénom a été changé) fait face au tribunal correctionnel de Beauvais, ce mardi 16 septembre.

« Je veux que la justice le reconnaisse coupable, parce qu’il est coupable. »

Sur le banc des prévenus, son ex-beau-père, Thierry G., 55 ans, poursuivi ce mardi pour « violences et agressions sexuelles sur mineur de moins de 15 ans », « corruption de mineur » et « enregistrement d’image à caractère pédocriminel ».

Au terme de l’audience, il a été reconnu coupable de l’ensemble des faits et condamné à quatre ans de prison dont deux avec sursis, une inscription au Fijais (fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes), à 9 450 euros de dommages et intérêts à verser à Laetitia et à verser 2000 euros à Isabelle (le prénom a été changé), sa jeune sœur, également victime.

Devenue à 24 ans éducatrice spécialisée, la jeune femme raconte son calvaire.

« Les violences physiques étaient quasi quotidiennes, des gifles, des coups de poing, souligne-t-elle. Il y avait aussi les insultes, des menaces de mort. »

Et des attouchements sexuels, qui se sont produits en 2013, dans le logement familial, dans un village proche de Beauvais.

« J’étais le vilain petit canard »

Laetitia a 11 ans.

« Il me demandait de lui faire des massages, raconte-t-elle. Il plaçait mes mains sur son sexe pour que je le masturbe. »

Lorsque la présidente lui demande si c’était « la première fois » qu’elle voyait un sexe d’homme, Laetitia acquiesce.

Elle reconnaîtra également avoir été contrainte de « lui faire une fellation ».

Ce n’est qu’une fois placée en foyer d’accueil que la parole de la jeune fille se libérera.

« C’est vrai que j’étais en rébellion, hystérique parfois, reconnaît-elle. Mais c’était en réaction aux faits de violences et aux attouchements. Pendant des années, personne ne m’a crue, j’étais le vilain petit canard de la famille. Heureusement que ma sœur est arrivée pour appuyer mes dires. »

En 2017, Isabelle, 15 ans, a été elle aussi victime des agissements de son beau-père.

« Plusieurs mercredis, il s’est masturbé devant moi, détaille-t-elle. J’étais tétanisée, je n’avais jamais vu de sexe en érection. Un jour, il m’a demandé de lui épiler tout le corps. Je n’ai rien dit à ma mère, elle était sous son emprise. »

Des SMS à caractère sexuel envoyés à sa belle-fille

Impassible, l’homme âgé de 55 ans écoute ses victimes.

S’il reconnaît les faits de violence du bout des lèvres — « Je n’aurai pas dû perdre mon sang-froid » — il nie fermement les agressions sexuelles.

« Je n’ai jamais été nu devant les enfants, jamais demandé de massage contre des récompenses, affirme-t-il. Ce sont leurs propos. »

La présidente lui demande alors des explications sur la centaine de SMS envoyés à Laetitia en 2017 alors qu’elle était dans son foyer d’accueil.

« Je voyais sa mère triste, je voulais renouer le contact », explique le prévenu.

« De lui dire : tu as un beau boule, j’ai des yeux, je t’adore ou de lui envoyer une photo de vous torse nu, c’est pour renouer le contact ? », interroge la présidente.

« Ce n’était pas sexuel, je voulais la rassurer elle avait des complexes, affirme Thierry G. Je ne pensais pas mal faire. »

« Et les émojis à caractère sexuel ? », enchaîne la présidente.

Caroline, la maman, apprendra les faits devant un juge.

Elle quittera Thierry G. dans la foulée.

« Je me sens coupable de tout ce qui est arrivé à mes filles, déplore-t-elle à la barre, ce mardi. Je n’étais pas une bonne mère. Pendant dix ans, il m’a dit que ma fille aînée était la pomme pourrie du panier, qu’elle pourrissait le foyer. »

En demandant 4 ans dont 2 avec sursis mais avec mandat de dépôt, la procureure souligne que « tous les symptômes du schéma incestueux » sont présents.

« On a affaire à un manipulateur pervers, appuie la magistrate. Il n’a eu aucune remise en question et a réitéré les faits en 2017. »