Témoignage | Victime d’inceste, Randal prend aujourd’hui la parole pour lutter contre les violences faites aux enfants
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
- 04/03/2017
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Randal Toto a été violée par son père quand elle était enfant. Elle fait aujourd’hui partie de l’association internationale AIVI qui lutte contre l’inceste et la pédocriminalité. Elle nous dévoile son histoire terrifiante.
Inceste. Ce mot encore trop tabou aujourd’hui est pourtant la bien triste réalité qui touche 4 millions de personnes en France. Par définition, l’inceste est le fait d’avoir des relations sexuelles non consenties avec un membre de sa famille. Une violence sexuelle, dont a été victime Randal lorsqu’elle était enfant. Un soir, elle part dormir chez sa grand-mère avec ses cousines et dans la nuit, son père entre dans sa chambre. Se produit alors l’impensable :
“J’ai senti son sexe dans mon dos, il me l’a fait toucher, et me l’a mis dans la bouche“. Le lendemain, elle se réveille avec des douleurs entre les jambes, et va voir sa grand-mère qui lui donnera un médicament. Et c’est tout. Jamais de sa vie elle ne parlera de ce qu’il s’est passé. “Jamais je ne raconterai mon histoire“, se promet-elle à ce moment-là.
Une décision poussée par le récit de sa soeur, qui a elle aussi été victime d’inceste de la part de leur père. Elle en a également parlé à sa mère, qui a très mal réagi, nous explique Randal. Puis elle a oublié toute l’histoire. Les professionnels appellent cela le “déni”, mais peut-on vraiment oublier un événement aussi tragique ? Non, car son corps lui envoyait des signaux qu’elle a mis du temps à interpréter. D’abord, elle était constamment mal et ça n’allait pas non plus dans ses relations amoureuses. “J’étais totalement au service de l’homme“, nous confie-t-elle. Finalement, à l’âge de 33 ans, grâce à un travail thérapeutique, elle finit par se souvenir. Et depuis, elle dédit son quotidien à la lutte contre les formes de violences faites aux enfants, au côté de l’association internationale AIVI, qui lutte contre l’inceste et toutes les violences sexuelles. A Marseille, elle mène un groupe de parole sur des thèmes différents tous les mois.
“On n’est pas capables de douter des compétences des parents”
“Nous parlons régulièrement du besoin de justice“, explique-t-elle. Car aujourd’hui, la société culpabilise les victimes, elle les musellent et donne un sentiment de honte intolérable. Elle cite l’exemple d’une ado de 12 ans qui a dénoncé son beau-père en 2011, mais que la police n’a pas prise au sérieux. “Car ce sont des histoires intra-familiales, et on ne peut pas s’imaginer qu’un adulte responsable soit capable de ça. On n’est pas capable de douter des compétences des parents“, critique-t-elle. Résultat, la jeune fille de 12 ans est tombée enceinte de son beau-père lors d’une récidive.
Randal regrette qu’aujourd’hui, la police ne soit pas suffisamment formée pour entendre un enfant. “A Martigues, nous n’avons qu’un seul agent qui est habilité à faire ça. Et c’est lui qui a fait la demande de formation, ce n’est pas la police qui la lui a proposée“. Et c’est au travers de l’association AIVI et du plan intergouvernemental sur la lutte contre les violences faites aux enfants, sorti le 2 mars, que Randall souhaite faire valoir et modifier les droits des enfants. Car malheureusement, la notion “d’incestueux”, n’a été ajoutée dans le Code Pénal que le 14 mars 2016, après une tentative en 2010 cassée par le Conseil Constitutionnel.. Et selon l’article 222-31-1, la loi qualifie d’inceste tous les crimes sexuels commis sur une personne mineure si son agresseur est un ascendant (père, mère, frère, sœur, oncle, tante, cousin, cousine), ou un conjoint qui a autorité.
Randal s’adresse aux candidats à la présidentielle
Un parcours du combattant donc. Et pour faire bouger les choses, Randal s’est adressée aux candidats à l’élection présidentielle à travers une lettre dévastatrice, dans laquelle elle rappelle que l’inceste représente 75% des crimes commis sur les mineurs :
“Les conséquences de l’inceste à l’âge adulte sont multiples: toxicomanie, dépression, tentatives de suicides, anorexie, boulimie, automutilations, prostitution et comportements sexuels à risque, maladies chroniques. L’étude américaine ACE (Adverse Childhood Experiences) a mis en évidence une espérance de vie qui peut être réduite jusqu’à 20 ans“.
Car, près de 90% des victimes de viols ne portent pas plainte. “C’est pourquoi les survivant(e)s de l’inceste ont particulièrement besoin des pouvoirs publics“, insiste-t-elle. Et malheureusement, en plus des dommages physiques, les violences sexuelles ont également un impact sur la santé psychologique et sur le bien-être psycho-social.
Source: Au Féminin
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