Guidel | reconnu coupable de viol, un sexagénaire est libéré jusqu’au procès en appel

oui

Pédocriminel En liberté

« La voix des victimes est volée »
Un sexagénaire a été condamné, en juillet, à douze ans de réclusion pour des viols commis sur sa belle-fille, alors mineure. Aujourd’hui, il est libre, en attendant son procès en appel. En colère, la victime a saisi le garde des Sceaux.

Jeudi 3 juillet. Il est minuit, après trois jours de procès, le verdict tombe.

Thierry Ruellan est condamné, par la cour d’assises du Morbihan, à douze ans de réclusion criminelle.

Il est reconnu coupable de viols incestueux sur sa belle-fille, alors mineure.

Des faits qui se sont déroulés à Guidel (56), de 2014 à 2018. Ysaline avait 14 ans lors des premières agressions.

« J’ai attendu sept longues années avant le début du procès », raconte, aujourd’hui, celle qui est âgée de 28 ans.

Le procès justement, il a été « très éprouvant, des journées intenses, de 9 h à 20 h », se remémore Ysaline qui ne travaille plus depuis.

« Je suis en arrêt, je traverse, à nouveau, un épisode dépressif », confie l’employée dans le secteur hôtelier. Ce 3 juillet, elle accueille le verdict comme un « soulagement ».

Son agresseur rejoint directement la maison d’arrêt de Vannes.

« Son incarcération a permis un début de reconstruction », explique Ysaline.

Quelques jours plus tard, Thierry Ruellan, 62 ans, fait appel de la décision. S’il a reconnu les faits, il conteste le quantum de la peine (l’avocat général avait requis quinze ans de réclusion).

Nouveau coup de massue pour la jeune femme. « Je ne m’y attendais pas », lâche-t-elle.

« Cette décision me paraît totalement injustifiée »

Elle n’est pas au bout de ses surprises. Le 4 septembre, celui qui vient de passer deux mois en détention formule une demande de remise en liberté devant la cour d’appel de Rennes.

Son avocat, Me Thierry Fillion, fait alors valoir les conditions de détention particulièrement difficiles.

Son client, quant à lui, a expliqué avoir besoin d’accompagner sa mère atteinte d’Alzheimer.

La chambre de l’instruction entend ces arguments et décide de remettre l’ex-beau-père en liberté. Au grand dam d’Ysaline.

« Cette décision me paraît totalement injustifiée. Tous les détenus vivent dans des conditions difficiles, il n’y a rien d’exceptionnel », proteste-t-elle.

Cette libération a une conséquence directe : le procès en appel n’est plus prioritaire. En effet, la cour d’appel audience en priorité les personnes placées en détention.

« Combien de temps vais-je devoir encore attendre ? Des années ? »,

S’inquiète celle qui a dû quitter la région pour se reconstruire.

« La voix des victimes est volée et cela, seulement quelques mois après le procès médiatique de Joël Le Scouarnec, à Vannes également. C’est incompréhensible », estime-t-elle.

Ysaline est atteinte mais reste debout. Elle a écrit au garde des Sceaux, Gérald Darmanin, pour demander que l’affaire soit rejugée rapidement.

Contacté, Me Fillion, conseil de Thierry Ruellan, veut dépassionner les débats. « On est gouvernés par l’émotion », indique-t-il. Selon lui, cette remise en liberté ne possède pas de caractère exceptionnel. Le pénaliste rappelle que son client n’avait jamais été condamné auparavant.

« Aujourd’hui, il a une famille et un travail. Il n’est pas dangereux d’après les experts et il a toujours respecté les obligations liées à son contrôle judiciaire. De plus, il n’y a aucun risque de fuite ni de pression sur la partie civile », indique Me Fillion. « Il n’y a rien qui justifie la détention provisoire, cette décision, c’est simplement la stricte application du code de procédure pénale. »

Ayant fait appel, Thierry Ruellan est présumé innocent jusqu’à son jugement.

Source(s):