Manche | 17 ans de prison pour un pédophile accusé d’abus sexuels sur quatre enfants

Un homme accusé d’abus sexuels, agressions sexuels, viols sur plusieurs enfants et détention d’images pédopornographiques

Illustration ©Actu.fr

 

Jeudi 18 juin s’est ouvert aux Assises de la Manche, à Coutances, le procès d’un homme de 51 ans, accusé de viols et d’agressions sexuelles sur mineurs, filles comme garçons, mais aussi de détention d’images pédopornographiques et de corruption de mineurs du fait de l’exploitation de ces images auprès de mineurs.

Il a été mis en accusation à la suite de plaintes parvenues à la gendarmerie de Lessay entre 2015 et 2017 de la part des mères des jeunes victimes. Le procès, sur trois jours, s’est achevé ce lundi 22 juin.

Au premier jour du procès, jeudi dernier, l’homme, la cinquantaine lourde, est debout face au président du tribunal qui l’interroge. Il est en détention depuis près de 3 ans, depuis le 8 août 2017 exactement. Il est accusé d’abus sexuels, dont des pénétrations commises entre 2013 et 2017 sur quatre gamins, deux fillettes et deux garçons âgés de 4, 5, 6 et 7 ans, sur la côte ouest de la Manche.

Des enfants auxquels il passait aussi des vidéos pornographiques.

L’alerte a été adressée aux brigades de gendarmerie de Lessay, de Périers et de Barneville-Carteret.

Les enquêteurs, qui ont fouillé la mémoire de l’ordinateur de l’homme incriminé, ont découvert qu’il avait collecté pour son plaisir 4 500 vidéos pédopornographiques. « C’est pour mon usage personnel », rassurait l’homme, auquel il ne serait pas venu l’idée de partager ces scènes sur Internet…

Un « bon garçon »

Ce premier jour du procès, une cousine de son âge, très proche de lui depuis l’enfance, son employeur (un conchyliculteur), le fils de celui-ci et les parents d’une petite fille abusée l’ont tous décrit comme un homme de confiance.

« Un bon garçon, serviable et rieur »

souligne sa tante.

« On a grandi ensemble, dit la cousine. C’est le parrain de mon fils, il était comme un frère »

« Ponctuel, disponible, sérieux et travailleur »

pour son employeur, qui au fil des années avait tissé des liens forts avec lui.

« On était comme une deuxième famille pour lui »

ajoute-t-il, rassuré par cet homme de 25 ans de plus que son garçon, qui accompagnait celui-ci dans les boîtes de nuit du coin, comme un copain, comme un chaperon qui ne touchait jamais à la drogue et qui ne cherchait jamais la bagarre.

Sa sœur de cœur le définit à l’audience non comme

« un vieux garçon, mais un ado qui ne pense qu’à jouer avec les enfants, un tonton loisirs ».

« Dans sa tête, il n’a pas grandi. Il n’avait pas la conversation d’un adulte, il était toujours avec des jeunes », a dit la tante.

Il avait bien eu deux liaisons avec des femmes adultes, mais sans succès, de courte durée. Marqué profondément par un manque d’affection dans son enfance, il se tournait vers les enfants.

« Il se retrouvait en eux, a expliqué le Dr Buton psychiatre, leur donnant l’affection qui lui avait manqué à lui ».

Mais pas seulement de l’affection…

La première petite victime

En 2013, des liens s’étaient créés entre un couple qui avait une petite fille de 4 ans et l’accusé. Les deux hommes partageaient la même passion pour la pêche.

« Un début d’amitié s’installait. »

L’enfant allait facilement chez l’ami de la famille. Celui-ci la demandait pour le week-end, l’emmenait à la piscine…

La petite préférait aller chez lui que rester seule à la maison. Parce que la maman et son compagnon travaillaient tard, elle avait peur.

Mais un jour de 2013, alors qu’il ramenait l’enfant de la piscine, la petite a dit à sa mère que « tonton » lui avait mis le doigt « là » (en désignant son sexe), geste qu’elle a refait devant les gendarmes et devant la gynécologue.

Et puis la petite a décrit des scènes que l’accusé a reconnu avoir commises plusieurs fois : il la déshabillait, la couchait nue dans son lit, se mettait nu à côté d’elle. Il lui faisait mal.

Dès ce premier jour d’audience, les experts ont tracé un portrait à la fois typé et inquiétant de l’accusé, qui, à chaque fois, cherche à donner le change et théâtralise son attitude, insistant lourdement sur sa honte.

Le docteur Buton, comme Mme Mouchel, psychologue, le présentent comme

« un pédophile au sens propre du terme, ayant une attirance déviante pour les enfants, les reléguant au statut d’objet sexuel ».

Lorsqu’il dit : J’ai conscience que ce que j’ai fait est mal, ça ne va pas au-delà, constate le Dr Buton, il ne va pas jusqu’aux conséquences de ses actes, sur le devenir des enfants. »

En résumé, « il les consomme »

Accusé par un enfant, il tire sur sa fenêtre

Vendredi 19 juin, au deuxième jour du procès, ce sont trois autres enfants, objets sexuels du même « tonton », dont on a appris le calvaire.

D’abord, les deux garçons d’une maman qui les élevait seule à la suite d’une séparation d’avec leur père : des gamins de 7 ans et 5 ans et demi en 2017, une situation difficile pour la maman au travail, mais que la présence et la bonne volonté du voisin, le « tonton » en question, rassurait et soulageait.

L’homme avait toute sa confiance (« aimable, serviable, aimant les enfants »), elle lui confiait volontiers les deux garçons.

Mais voici qu’un jour, le plus jeune, qui avait passé seul une nuit chez le voisin rapporte à sa mère, avec ses mots d’enfant, une scène de masturbation à laquelle le voisin se livrait, assis dans un canapé auprès du petit, en visionnant des films dont le sujet était qualifié de « bêtises » par l’enfant.

Affolée, la maman a demandé des comptes au voisin qui, furieux d’avoir été dénoncé, a tiré quelque temps plus tard sur la fenêtre de la chambre du petit, en laissant sur le mur des impacts (il a fallu l’insistance de son avocate pour que l’accusé accepte de reconnaître qu’il était le responsable du tir, ce qu’il avait soigneusement nié depuis trois ans).

Moindre mal : le petit n’avait pas été victime de sévices sexuels de la part du « tonton ».

Des bonbons et cadeaux en récompense

Mais il n’en était pas de même de son aîné qui, ayant passé plusieurs nuits chez le voisin, avait raconté avoir lui aussi visionné des « bêtises », des scènes où des enfants se trouvaient en situation d’objets sexuels.

Il s’agissait pour l’homme, nu, de montrer au garçon la méthode à utiliser avec lui, « leçon de choses » qui évitait de longs discours et qui permettait de comprendre immédiatement les gestes à accomplir pour le satisfaire.

Le petit avait été dénudé aussi, et l’homme, usant de son ascendant, et lui proposant des bonbons en récompense, avait contraint l’enfant à des fellations, notamment en lui tenant la tête pour le diriger vers son sexe.

La quatrième petite victime est née en août 2013. En avril 2017, elle avait tout juste 3 ans et demi lorsqu’elle est tombée dans les filets lubriques de l’accusé. Elle aussi était d’une famille recomposée, et avec son frère aîné, elle allait chez le voisin qui les emmenait à la plage, à la piscine, et qui leur faisait des cadeaux (une peluche pour elle).

Trop, aux yeux du père de la petite, qui trouvait ça suspect…

En avril 2017, brutalement, la petite fille, joueuse, épanouie, est devenue violente avec sa mère, avec les adultes, refusant les câlins dont elle était friande jusqu’alors. Elle dort mal. Elle fuit les hommes adultes. Elle cache sa bouche… Et en 2018, elle finit par dire au compagnon de sa mère :

« Tophe a touché mes fesses ».

Depuis cette accusation, l’homme nie l’avoir touchée, farouchement. Mais les investigations dans son ordinateur ont permis aux gendarmes de découvrir qu’il avait photographié la petite, nue, les jambes écartées, pour son propre usage.

« Photos souvenirs »

Au deuxième jour du procès, la cour d’assises a en effet été amenée à examiner les activités informatiques de celui-ci, relevées par le groupe de lutte contre la cybercriminalité de Caen qui avait été requis le 7 août 2017 après saisie du matériel informatique de l’accusé.

Les enquêteurs avaient découvert un total de 4 500 fichiers sur ordinateur, sur CD, sur clé USB, téléchargements ou mise en mémoire de vidéos et d’images qui avaient été effacées, mais dont l’effacement laissait assez de traces pour que les documents puissent être ouverts et analysés.

Des exemples de ces documents ont apparu sur écran tout au long du compte rendu du gendarme. L’accusé a vu défiler ces photos d’enfants dénudés, abusés, en particulier celles pour lui familières puisqu’il les avait prises lui-même. Sans baisser les yeux, apparemment indifférent.

Il est vrai qu’il était habitué à regarder ces « photos souvenirs » qu’il avait faites et conservées « pour les consulter et s’exciter à nouveau » comme il l’a répondu au président de la cour qui lui demandait quel en était l’usage.

Il avait même constitué un fichier particulier du nom de la petite fille de 4 ans renfermant 21 clichés d’elle aussi insoutenables les uns que les autres. Ces photos lui servaient également de démonstrations destinées aux gamins pour qu’ils comprennent que ce qu’il leur demandait était « normal » puisqu’ils voyaient les scènes sur l’écran, celles-ci leur servant à les familiariser aux gestes qu’ils auraient à faire ou à subir.

En conclusion, l’enquêteur a montré que l’accusé s’est intéressé à la pédopornographie au moins depuis 2010, ayant pratiqué des recherches, extrait, sauvegardé, visionné et renouvelé ses consultations des milliers de fois en 7 ans, jusqu’à sa garde à vue et son placement en détention en 2017.

Il a un attrait réel pour l’enfance abusée qu’il observe au moyen d’éléments divers, les mangas, dessins animés érotiques, des scènes virtuelles ou réelles, et de ses propres photos.

L’enquêteur le définit comme « un pédophile type, qui cible ses victimes dans la petite enfance, dans un créneau de 5 à 8 ans, aussi bien des fillettes que des petits garçons. On n’a jamais trouvé d’image d’adolescents sur les documents saisis. »

17 ans de prison

Aujourd’hui, un peu avant 19 h 00, la cour a publié son verdict :

Le prévenu, reconnu coupable des faits de viols, d’agressions sexuelles, de corruption de mineurs par le visionnement d’images pédopornographiques qu’il imposait aux petits, de détention et de consultation habituelle de telles images (4 500 retrouvées dans ses divers supports informatiques), a été condamné par la cour d’assises à 17 années de » réclusion criminelle, à un suivi socio-judiciaire de 7 années après sa sortie de détention.

Et son nom figurera désormais sur le fichier des délinquants sexuels.

source : actu

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